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jeudi 14 juin 2012

Front de Gauche et Europe : un manque d'audace, ou ?...




Un aspect du programme "L'Humain d'abord" du Front de Gauche m'interpelle d'emblée. Sachant combien ce volet du projet était essentiel, indispensable à qui voulait vraiment avoir les coudées franches, j'ai cherché où le collectif qui a conçu ce manifeste parlait d'Europe. Selon une logique qui était la sienne, je ne l'ai trouvé que dans le chapitre 7, après la création d'une VIe République. Le souci de ce collectif est effectivement de solliciter l'avis de tous les Français afin d'aller à Bruxelles plaider sa cause, fort de ce soutien populaire. J'encourage tout le monde à (re)lire les pages 67 à 71 du fascicule.

C'est effectivement une option. A mon avis, si elle se présentait ainsi, elle se heurterait à des intérêts parfaitement divergents non des peuples (leur avis ne serait pas pris en compte, comme celui des Français et des Néerlandais en 2005, ou pas sollicité du tout), mais des gouvernants. Ceux-ci ne sont pour la plupart pas élus, et ont une tout autre démarche, celle de ne pas déplaire aux financiers qui leur prêtent de l'argent. Effet néfaste de l'article 123 du traité de Lisbonne, celui qui est mis en cause précisément dans le chapitre 7 de "L'Humain d'abord".

L'Allemagne, en premier chef, mais d'autres pays aussi, en particulier les plus à l'est pour des raisons diverses, vont sérieusement tiquer.

En cas de refus (acquis d'avance, on peut s'en douter), alors seulement, serait envisagé un retrait du Traité de Lisbonne, une sortie de l'euro-monnaie unique qui lui est liée, et une nouvelle donne avec appel à la banque centrale française (la BdF) pour financer à taux quasi-nul les réformes et aménagements nécessaires. Temps perdus en palabres inutiles ? Au moins deux ou trois ans. Sans doute bien plus.

Depuis longtemps je préconise une sortie simultanée de tous les traités européens depuis 1957 (traité de Rome), et aussi de façon logique de l'OTAN auquel les traités les plus récents assujettissent de façon plus ou moins explicite tous les États européens, zone Euro ou pas. Sortie totale : en 1958 De Gaulle avait entériné une OTAN strictement défensive, à laquelle il n'avait adhéré que du bout des lèvres. Aujourd'hui cet assemblage monstrueux n'est plus qu'offensif, et ses intérêts ne sont que ceux du pays situé entre le Rio Grande et les Grands Lacs. Il n'est pas question de lui fournir subsides et troupes supplétives. Ses intérêts sont généralement antagonistes avec ceux des Européens. En politique extérieure il n'y a pas d'amis, il n'y a que des intérêts plus ou moins convergents.

Actuellement, un bon quart de ce que verse notre pays au budget de l'Europe bruxelloise et libérale est perdu pour notre budget national. Il se produit une péréquation vers les pays les plus pauvres, ce qui est une bonne idée humainement parlant, si c'est judicieux. Mais également il faut penser à ces milliers de fonctionnaires européens aux énormes avantages (dont des retraites auxquelles la plupart de nos compatriotes n'oseraient jamais rêver). Rien que le budget traduction et interprétation de ces 27 pays, parlant 21 langues, utilisant 3 alphabets écrits, est colossal. Ceux induits par la mise en application des directives ne l'est pas moins. Il faut savoir que, d'anecdotique, le volume de nouveaux documents juridiques de l'Union en est arrivé aujourd'hui à un rythme de cent pages par jour. Ces cent pages doivent être ingurgitées par les administrations des États, transcrites en lois, appliquées par les multiples entreprises, administrations locales, etc... de tous les territoires, engendrant un surcoût inchiffrable. Car tous les pays doivent appliquer toutes les directives, contents ou pas. Que cela soit adéquat, ou pas. Peut-on imaginer la gabegie budgétaire que cela représente ? Les plus faibles s'écroulent, et c'est logique.

Voilà pourquoi la sortie de ce galimatias est urgente, pas question d'attendre encore une année, voire bien plus, pour appliquer une nouvelle donne. Imaginons les économies engendrées pas cette simple donnée : malgré une sortie concomitante obligée de l'Euro-monnaie unique, des économies très importantes peuvent se dégager immédiatement. On peut parfaitement continuer à utiliser les billets, les automates de paiement, les distributeurs sans rien y changer, et apporter une simple correction aux relevés de banque avec par exemple une colonne en euros (indicative), et une colonne un peu différente en monnaie interne, avec une mise à jour quotidienne de la parité. Coût : presque rien.

L'euro fut une belle idée, mais appliquée en tant que monnaie unique et obligatoire à des pays aux contextes et aux motivations complètement différents, c'était l'échec assuré. Ceci dit, il peut parfaitement rester une monnaie commune, applicable à tous les pays hors-Europe (géographiquement). Sans doute ce compromis contentera-t-il moyennement l'Allemagne, mais ce sera le prix à payer pour une trop grande hégémonie refusant de considérer les contextes des autres pays de la zone euro.

Voilà ce que, concurremment à la position du Front de Gauche, je propose. Cette proposition sera-t-elle un jour mise en application ? En tout cas prenons date : voici UNE solution à la situation actuelle, qui n'est brillante nulle part.

Bien entendu, de pair à cette initiative, il s'agira de mener une sévère audit de la prétendue Dette (celle qui a démarré son ascension le jour où les banques privées furent le seul recours de l'État pour ses financements légitimes). Mais cela, le Front de Gauche en était conscient, et l'a inscrit dans ses prévisions.

Bien que modérée, très modérée, la réforme que le Front de Gauche voulait instaurer était encore trop pour les hommes de Finance et de Pouvoir. D'où cette énorme publicité (qui a dit propagande?) pour des hommes qui ne dérangeaient pas les lignes, y compris dans une pseudo-gauche qui a pris bien soin d'aller à Londres assurer les banquiers que tout allait bien, que la situation était maîtrisée.

Preuve irréfutable de cette allégeance : les Marchés n'ont pratiquement pas bougé à la lecture des résultats des élections françaises. Tout va bien, les intérêts des Maître du Monde sont bien gardés.

Beurk.


3 commentaires:

  1. merci de ce très bon point de vue critique ; oui, on peut bien parler de "propagande" à propos des manœuvres des eurocrates qui REGNENT sans avoir été élus ; d'où le vice premier et fondamental du recours aux banques privées pour les prêts qui sont du ressort, normalement, des banques nationales ;
    en fin de ton texte, tu évoques la "réforme modérée" proposée par le front de gauche : c'est vrai, mais les vrais pouvoirs bruxellois y ont déjà vu "rouge"!!!
    c'est dire que les manœuvres en cours contre nos amis grecs au bord du pouvoir légal vont bon train : la dictature des banques vit de la crise créée par elles sur le dos des pouvoirs populaires en lambeaux !
    c'est pas gagné, mais
    ah ça ira, ça ira, les spéculateurs à la lanterne !!!

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  2. Pour approfondir, si tu n'as pas lu le bouquin
    http://www.despasperdus.com/index.php?post/2010/02/02/l-Europe-sociale-n-aura-pas-lieu

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  3. Merci pour la référence, DPP !

    Ton intervention est MAJUSCULE, Rem* : comment va le coude ce soir ?

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