Un groupe de 73 militants se revendiquant du groupe Génération Identitaire a investi [...] un grand bâtiment gris doté d'un minaret situé en banlieue de Poitiers, à Buxerolles, et qui doit devenir d'ici fin 2013 sa grande mosquée.Vers 05h45 du matin, ils se sont installés sur le toit et ont déployé une banderole affichant le nom de leur mouvement et une autre indiquant que "Charles Martel a battu les arabes à Poitiers en 732".
Cette
dépêche de l'AFP nous rappelle un événement certes ancien,
mais qui a probablement déterminé le sort de l'Europe, voire à
plus long terme du monde. Comme nous le signale Salah Guemriche dans
son ouvrage "Abd
er-Rahman contre Charles Martel", paru chez Perrin en mai
2010, la bataille a été causée par une sorte de scandale digne
tout au plus de Paris-Match : ce serait le mariage entre
Numérance-Ménine, dite Lampégie, fille du duc d'Aquitaine, avec
Munuza, gouverneur berbère de Narbonne. Colère à la fois de
"Charles Martel" (Carl Martieaux le fruste homme de guerre), basé à Trèves, et plus encore d'Abd er-Rahman,
lettré émir de Cordoue qui voyait ses lieutenants en prendre à leur aise
avec un Islam encore peu intégré par les Berbères.
Il s'en fallut de fort peu que ce ne fût l'émir qui triomphât.
Sur cette hésitation de l'Histoire s'est greffé ensuite un reflux
musulman, d'abord de la Septimanie de l'époque (à peu près le
Languedoc-Roussillon d'aujourd'hui), puis bien plus tard et
progressivement de la péninsule ibérique. Ne nous leurrons pas :
il eût pu arriver un autre événement qui aurait précipité les
guerriers dans le même choc destructeur. Retenons cependant cette
thèse.
Et si... et si c'est Abd er Rahman, juste un peu plus en forme ce jour-là, qui
l'avait emporté ? Rappelons-nous : c'est en 732 qu'eut
lieu la bataille, exactement le samedi 25 octobre. Charlemagne ne serait probablement pas devenu
empereur en 800, ses petits-fils n'auraient pas partagé son empire
en 843 à Verdun (partage qui subsiste en partie aujourd'hui encore),
la France que nous connaissons n'aurait jamais existé et n'aurait de
toute façon pas porté ce nom, les Normands de Guillaume le
Conquérant n'auraient très probablement pas envahi l'Angleterre en
1066... et ainsi de suite jusqu'à nos jours. Il y aurait eu de
"glorieuses" batailles plus au nord, mais la plus grande
partie de ce qui est aujourd'hui notre pays aurait assez probablement
été sous la Charia accommodée à la sauce andalouse, et non sous la férule tout aussi pointilleuse –
voire plus – de la chrétienté romaine.
Peut-être même l'Italie aurait-elle aussi basculé dans la zone d'influence du Croissant, ce qui aurait causé une Renaissance à la mode de Cordoue ou de Grenade. Après tout, les Arabes ont apporté beaucoup de choses à notre civilisation actuelle.
Quand des nationalistes viennent ainsi s'attaquer à un édifice bientôt voué au culte, on pourrait presque penser aux pillages des anciens temps même s'il n'y a pas eu de dégradations. En quoi un lieu de prière peut-il gêner des personnes ? Rien ne les oblige à y entrer pour faire leurs dévotions, ou pas. Dans une autre vie, peut-être seraient-ils de bons musulmans attentifs aux préceptes principaux d'une religion simple et moins pervertie. Car après tout, si les cultes suivent les batailles, les habitants, eux, restent. Si l'Histoire avait pris un autre tour, ceux qui la font réellement, les plus humbles, auraient toujours été là. Seuls ceux qui l'écrivent n'auraient pas été les mêmes, ou sans doute auraient-ils écrit tout autre chose.
Pensons à un seul facteur : ce basculement a peut-être été
néfaste, mais nous ne le saurons peut-être pas non plus. Avec la
dictature d'une certaine finance capitaliste, qui de plus en plus
paraît approcher d'une roche tarpéienne, nous sommes assez
vraisemblablement à la veille d'un autre Poitiers, d'un autre Quitte
ou Double des puissants. Établi sur moins que du sable, le Grand
Capital, pervers narcissique, peut s'effondrer d'un coup, malgré la poigne qu'il maintient
serrée sur la plupart des gouvernants du monde. Après tout, il
n'est qu'une religion de plus, mais peut-être la religion de trop...
bab