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vendredi 10 janvier 2014

Le monde contaminé ? Merci Fukushima

Rappelons les faits. Le 11 mars 2011 un séisme de très forte magnitude : 9,0, ce qui est parmi les plus forts connus, a largement secoué la côte du Tohoku,  région nord-est de Honshü (île principale du Japon) . Ce séisme sous-marin, en déplaçant brutalement la lèvre d'une longue faille de 4 ou 500 kilomètres de long sur une distance de 10 mètres, a déclenché un énorme tsunami, avec des vagues atteignant 30 mètres. Le résultat en a été catastrophique pour toute la région de Sendai. Sur le moment, les informations faisaient surtout état de l'incendie monstrueux d'une raffinerie, qui fut très difficile à éteindre.

En fait, le plus grave s'est passé au niveau des centrales nucléaires. La plus touchée fut celle de Fukushima Dai Ichi, au sud de Sendai. Une autre, Fukushima Dai Ni, n'eut que des dégâts mineurs parce que plus loin encore vers le sud. A Fukushima Dai Ichi, les installations déjà très malmenées par le séisme ont reçu le coup de grâce avec la vague de 14 mètres qui les ont submergées. Totalement hors contrôle, plus du tout refroidis, les réacteurs N°1 à 3 ont subi pleinement l'échauffement de leur cœur, qui a fondu (formation d'un corium) et a percé l'enveloppe de confinement. Cela explique des explosions, dues au gaz, l'hydrogène libéré par l'eau résiduelle de refroidissement, sur les réacteurs 1 et 2. Cela explique que le réacteur 3, chargé au MOX (mélange de plutonium et d'uranium appauvri), a pour sa part complètement divergé, comme on dit, et s'y est produite une explosion spontanée de type nucléaire. Le réacteur 4 étant déchargé, n'a pas explosé, mais sa piscine de travail contient toujours les barres de chargement qui ne doivent surtout pas manquer d'eau. Les réacteurs 5 et 6, plus au nord, ont en revanche peu souffert.

En raison des vents et des pluies, une grande partie de l'île de Honshü a été arrosée par les émanations de la centrale, jusqu'à Tôkyô et au-delà. Voilà le danger. Le second danger provient de l'eau des nappes phréatiques, et de celle qui a servi à arroser  les installations pour éviter le pire. Toute cette eau, bien que stockée en partie, a souvent du fait de fuites inévitables dans les canalisations provisoires, réussi à joindre la mer, et elle continue à le faire à raison de 400 litres par jour. Il s'agit d'eau largement contaminée. Déjà son action se fait sentir sur des saumons pêchés au nord-ouest des États-Unis.

Une autre partie des poussières et gaz s'échappant des réacteurs endommagés a pris la route aérienne au-dessus du Pacifique. Certes, avec la distance cette partie s'est diluée, mais une dizaine de jours après le début du sinistre toute la côte ouest de l'Amérique du Nord a été touchée. Cela explique que même en Californie, des nourrissons en quantité anormale présentent des anomalies thyroïdiennes graves. Ce sont ceux qui ont subi des atteintes faibles. Pour les atteintes fortes, le diagnostic a été plus terrible : ces enfants ont subi un décès prénatal. Le diagnostic a été plus long à établir, mais il a pu être confirmé. Ce genre de constat a été fait jusqu'au Québec, en raison surtout des neiges qui pouvaient emporter des particules plus importantes.

Ce processus n'est pas terminé. Des gaz continuent toujours à s'échapper des réacteurs condamnés, en particulier du N°3 : la radioactivité intense qui l'entoure interdit toute approche, même avec des engins automatiques ou télécommandés. Le bombardement intense des particules détruit les circuits électroniques.  Comme on ne sait pas où sont réellement les coriums, une reprise de criticité est encore possible, en particulier au N°3. Donc une autre explosion est envisageable. Ajoutons que la piscine du N°4, pleine de barres, est perchée pour des raisons techniques à 30 mètres de hauteur. Un autre fort séisme, une autre explosion du N°3 pourraient disjoindre la structure avant qu'elle ne soit vidée - il faudra au moins un an - et les barres surtout usagées, non refroidies, pourraient devenir un terrible danger de contamination planétaire.

Il ne s'agit pas de paniquer, mais de rappeler les faits. La routine fait qu'on finit par oublier ces dangers. Dès à présent il faut en tenir compte, tenter de prévenir les risques, de les anticiper avec méthode. Bien entendu, le danger nucléaire est maintenant démontré amplement. Cela n'empêche pas les "fondus" du nucléaire de continuer à préconiser ce mode de production d'énergie, sans tenir compte du coût très important de celui-ci quand il faut démonter une centrale en fin de vie. En fait, c'est tout simple : ces beaux Messieurs sortis d'écoles dites prestigieuses ne savent pas le faire.

centrale de Fessenheim
En revanche, de juteux contrats pour la construction de nouvelles unités se signent encore fréquemment, comme en Arabie Saoudite récemment. Pour les centrales en service, on se contente artificiellement d'augmenter leur durée "administrative" de vie. Un peu plus de profit sur des mécaniques "rentabilisées", mais affaiblies par le bombardement incessant des particules ; et puis, cerise sur le gâteau, pendant ce temps-là la question du démantèlement est suspendue. Excepté que, si une catastrophe intervient, l'addition sera colossale, voire impossible à régler. C'est pourtant ce qui a failli arriver le 27 décembre 1999 à la centrale du Blayais, de fort peu, quand les bâtiments ont été envahis par l'eau et que par hasard deux pompes sur une dizaine ont tenu le coup. C'est ce qui pourrait arriver, en pire, si une crue de l'Ill venait à causer l'inondation de l'installation de Fessenheim, la plus vétuste, et que le Rhin soit contaminé jusqu'à son embouchure (quatre pays concernés).

Alors, Messieurs les nucléaristes, toujours flamboyants ? Toujours prêts à en remettre une couche, quand la situation actuelle est déjà plus que dramatique ? Il est grave que les politiciens, ceux qui décident,  soient de connivence au niveau international.  L'AIEA n'est qu'un lobby de plus, au lieu de jouer son rôle de policier du nucléaire hors de toute considération financière ou idéologique. Le Japon, le vrai, l'authentique, est en train tout simplement de s'effacer de la carte, mais rien n'y fait.  Faudra-t-il instituer (mais qui oserait le faire ?) un tribunal international pour juger tous ces malfaiteurs AVANT qu'il ne soit tout-à-fait trop tard ?

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