-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-:-
Vitrolles pour comprendre Hénin-Beaumont
Pour commencer ce billet, une fois n’est pas
coutume, je veux me rendre agréable à l’héritière de Montretout. Depuis
des années, elle est affublée d’un quolibet qui la rend vague. Aussi,
j’entends lui restituer son patronyme en entier : Marion Anne Perrine Le Pen, née à Neuilly-sur-Seine, résidant au manoir de Montretout à Saint-Cloud. Héritière, de manière indirecte, de la fortune de M. Lafargue,
patron décédé des ciments éponymes. Voilà, je pense qu’une injustice
est réparée : Marine, c’est vraiment trop « peuple » quand on a une
aussi belle ascendance. A l’heure où nous nous battons pour que la
classe ouvrière retrouve ses symboles, je veux contribuer à ce que la
grande bourgeoisie, dont est issue la Le Pen, retrouve les siens. Voilà
donc le retour de Marion Anne Perrine Le Pen.
Les vrais parents politiques de Marion Anne Perrine Le Pen |
Ceci, étant posé, je veux revenir à ce qui n’est pas
la propriété de Marion Anne Perrine héritière millionnaire Le Pen :
Hénin-Beaumont et la 11e circonscription du Pas-de-Calais. Beaucoup
s’émeuvent des hauts scores de la châtelaine, fière défenseure des intérêts du capital,
dans une circonscription éminemment ouvrière, puisque nous sommes là au
cœur du bassin minier. Qui s’intéresse à l’histoire du mouvement
ouvrier connaît ces noms : Carvin, Wingles, Noeux-les-Mines… Ce sont
sites de hautes luttes sociales, de combats à mort avec le fascisme
appuyé, comme de juste, par le grand patronat minier. Alors, que vient
faire l’héritière de Montretout dans ce pays noir (de charbon) et rouge
(du sang des ouvriers) ? Je vous propose, pour comprendre, un détour par
Vitrolles, à l’opposé géographique de Hénin.
La ville de Vitrolles a été prise par
l’extrême-droite, incarnée par Catherine Mégret, en 1997. Pourtant,
cette cité, connue à l’époque pour sa plateforme logistique et son
équipe de hand-ball, est un fief socialiste de longue date. Le maire en
est Jean-Jacques Anglade. On croise de tout à Vitrolles à l’époque. Et
pourtant, la ville va s’offrir à cette tendance de l’extrême-droite qui
se voit, déjà, en fer de lance d’une droite autant recomposée que
décomplexée. Ce n’est pas le moindre des paradoxes de la Le Pen que
celui-ci : près de 14 ans après la scission qui donnera naissance au
Mouvement national républicain, Marion Anne Perrine a repris et fait
triompher, au sein du Front national, la ligne initiée par Bruno Mégret.
Mais comment Vitrolles a donc pu basculer dans le camp de celles et ceux qui défendent la « préférence nationale » ou point de créer une prime pour les « bébés français » ? La responsabilité du parti dit « sérieux » n’est pas mince dans cette histoire. Sur sa fin, le « système Anglade »,
du nom de celui qui est encore le maire socialiste, mêle arrogance,
clientélisme, affairisme. Jean-Jacques Anglade c’est : gestion opaque,
goût démesuré pour la comm’ et ce qui n’est pas encore le « bling bling », plus des démêlées avec la justice dont une mise en examen pour fausse facture… Ah… il y aurait des similitudes avec l’état du Parti dit « sérieux » dans le Pas-de-Calais ? Ah bon…
La comparaison peut ne pas s’arrêter là. Nous sommes
dans deux départements où, selon la croyance populaire, dès le moment où
elle est floquée du poing et de la rose, une chèvre peut être élue.
Dans les Bouches-du-Rhône comme dans le Pas-de-Calais, le seul obstacle à
l’élection c’est le petit baron d’à côté qui peut aussi prétendre à la
légitimité des urnes. Les aspirations des citoyens, trouver des
solutions à leurs problèmes de tous les jours, là n’est pas l’important
puisque, à la fin, ils voteront pour vous. Du coup, on peut se permettre
de promettre à qui un emploi, à qui un logement, en échange de quelques
voix. Et, pour financer tout cela, quelques belles factures
sur-dimensionnées. Peu importe…
Or, parfois, les électeurs, même pauvres, ont envie
qu’on s’occupe d’eux - vraiment. Or, parfois, les électeurs, même
pauvres, aiment avoir des élus sans casserole. Or, parfois, les
électeurs, même pauvres, aspirent à ce que les élus qui les représentent
leur permettent de rester dignes. Il y a de la morale, dans
l’aspiration des électeurs, même pauvres. Or, l’incapacité du Parti dit « sérieux »
à faire le ménage, dans les Bouches-du-Rhône comme dans le
Pas-de-Calais, va détourner certains de leurs supporteurs. Et, « puisque
tout est pourri », autant filer la clé de la baraque à ceux qui ne les
ont jamais eues. C’est ainsi que Catherine Mégret arrive à l’hôtel de
ville de Vitrolles en 1997. Ouvrant une parenthèse d’un peu plus de cinq
ans, au cours de laquelle l’extrême-droite montrera son vrai visage.
Elle est, encore plus que d’autres, capable de se mettre hors la loi.
Pour en avoir le détail, je vous suggère la lecture du blog de mon ami Didier Hacquart, avec qui j’ai eu le plaisir et l’honneur de militer, quand nous avons ramené Vitrolles dans le giron de la République.
Donc voilà un bref rappel historique qui permet de
mieux comprendre pourquoi il est essentiel, pour la gauche, d’être
elle-même - « sans complexe et sans casserole ». Ce n’est qu’à partir de ce moment-là que les militants peuvent à nouveau refaire de la politique
et poser les vraies questions : qui a fermé les mines, l’immigré ou le
banquier ? Pourquoi on ne trouve plus de boulot, parce que c’est le
voisin qui l’a pris ou parce que la financiarisation de l’économie
transforme l’être humain en variable d’ajustement ultime ?
Au final, ma conclusion est bien celle-là : si nous
sommes contraints d’aller porter le fer en première ligne une nouvelle
fois face à l’extrême-droite, c’est bien parce que le parti dit « sérieux »
a failli. Comme à Vitrolles, il a connu la débâcle : l’état-major a
refusé de prendre ses responsabilités et de mener le nettoyage de ses
propres positions. C’est une faillite morale autant que politique qui
nous met en première ligne, quand nous aurions pu nous contenter de nous occuper de nous mêmes.
Mais, une fois de plus, nous sommes incapables de nous satisfaire de
gérer nos bons résultats électoraux : nous sommes habités par l’esprit
de responsabilité politique.
—————————–
Bonus vidéo : Massilia Sound System “Ma Ville est malade”
Article très sympathique, merci pour le partage!
RépondreSupprimerAmicalement
Oui, Rosa, très sympathique ! Mais plus encore important... :
RépondreSupprimerIl est fondamental de remettre à l'honneur le sens moral, primordial, qui devrait toujours guider, faire corps avec le sens politique !
Dans l'idéal - libertaire, souvent calomnié en vaine utopie - il ne devrait y avoir qu'un seul concept englobant les deux notions de "morale" et de "politique" : c'est le sens du civisme... de "l'humain d'abord"...
Nous savons bien qu'au Front de Gauche, lié à ses racines de partis dits "de gouvernement", cette primauté du civisme reste un slogan, souvent, cependant que perdurent des batailles "de crabes" entre organisations et au sein de celles-ci. C'est à nous tous de guérir le F de G de cette "maladie sénile" de luttes de pouvoirs dans la coulisse (c'est pire que la "maladie infantile" dénoncée par Lénine!) : par la vigilance et la pression de nos "bon sens citoyen" : on en prend doucement le chemin !
Mélenchon "chez les Chti", oui, qu'il y soit bienvenu ! Mais, oui, priorité aux chtis, pleins de plaies et bosses du passé, et je l'espère, pleins d'espoirs, à écouter et suivre !...
Tu as d'excellentes lectures ;-)
RépondreSupprimer