Il est 5 heures 46 minutes 23 secondes, le 11 mars 2011, temps universel (heure de Greenwich), soit 14 h 46 min 23 s au Japon, ou 6h 46 min 26 s en France. Une date dont il faudra se souvenir.
Sur un front de 400 kilomètres, au large de la côte pacifique du Japon, une faille se décale de 10 mètres en quelques secondes. Elle occasionne à la fois un tremblement de terre de magnitude 9, d'une violence rare, sur la côte du Tohoku ; et un raz de marée d'une hauteur exceptionnelle.
La centrale Fukushima Daiichi, plus au nord que sa compagne Fukushima Daini, reçoit de plein fouet le choc du séisme, qui bouscule les installations, coupe des câbles, plonge en état de choc les employés. Déjà l'installation est pratiquement ingouvernable. Un peu plus tard, la monstrueuse masse d'eau (14 mètres de haut, alors que les protections ne dépassent pas 4 mètres) vient noyer les moteurs déjà endommagés, créer des courts-circuits....
Les réacteurs 1 à 4 sont de loin les plus touchés. Le numéro 4 est en maintenance, donc un arrêt de refroidissement du confinement n'a pas de conséquences dramatiques. En revanche le combustible est alors dans la piscine de service, à 30 mètres de haut. Une fissuration de celle-ci serait catastrophique. Les choses sont encore en l'état aujourd'hui, même si des barres neuves ont commencé à être évacuées. C'est un processus très long.
Pour les réacteurs 1 à 3, en revanche, c'est la débâcle. Plus de refroidissement du cœur, donc celui-ci s'échauffe. L'eau de refroidissement est décomposée, de l'hydrogène s'accumule. Le 11, le 12, le 15, d'énormes détonations confirment que le gaz a explosé. Pire, le 15 c'est la machine numéro trois qui saute à son tour. Elle est chargée au MOX, ce mélange d'uranium ordinaire, et de plutonium à 7%. Instable et terriblement délétère, ce métal diabolique entre en masse critique et provoque une explosion nucléaire spontanée. La vidéo montre très nettement, juste après un éclair, la montée très haut d'un mélange de gaz et de matériaux pulvérisés. Les plus lourds retombent sur le site. Pour les autres, on a appris tout récemment que les masses de poussières noires retrouvées assez loin du site, proviennent de cette explosion. Empoisonnement garanti, pour tout organisme ayant été en contact avec les résidus.
Pendant ce temps-là, les cœurs de plus en plus chauds s'enfoncent dans le sol, fondant les matériaux et le sol rencontrés, risquant à tout moment de déclencher de nouvelles explosions par contact avec les nappes phréatiques. Trois ans plus tard, personne ne sait exactement où sont ces cœurs, ni s'ils ne vont pas avoir un retour de criticité occasionnant de nouvelles explosions plus profondes.
Pendant ce temps-là, les cœurs de plus en plus chauds s'enfoncent dans le sol, fondant les matériaux et le sol rencontrés, risquant à tout moment de déclencher de nouvelles explosions par contact avec les nappes phréatiques. Trois ans plus tard, personne ne sait exactement où sont ces cœurs, ni s'ils ne vont pas avoir un retour de criticité occasionnant de nouvelles explosions plus profondes.
Les hommes de la centrales ne peuvent qu'arroser comme ils peuvent, avec de l'eau douce, mais très vite de l'eau de mer aussi, pour parer au plus pressé et refroidir comme ils le peuvent le désastre. Le mélange de ces eaux de refroidissement, des eaux de pluie qui tombent sur les réacteurs torturés, de la nappe phréatique partout présente, est stocké en masse sur le site. Les réservoirs, les canalisations, les réacteurs fuient : une proportion importante de cette eau, malgré tous les efforts, s'en va jusqu'à la mer. Les poissons en sont très affectés, de plus en plus loin de la centrale.
Les courants, en trois ans, ont déjà réussi à transporter une partie de cette eau jusque sur les côtes pacifiques du continent américain. Déjà les saumons pêchés sur la Côte Ouest présentent un taux de radioactivité suspect. Cela s'ajoute encore aux effluents provenant des installations nucléaires US de l'Arizona ou de l'Utah. Il ne faut pas oublier, bien entendu, les poussières soulevées par les explosions, qui si elles sont assez légères ne se gênent pas pour faire en altitude le tour de la Terre.
Trois ans plus tard, quel est le bilan ? Déjà, malgré le manifeste blocage d'information par les autorités japonaises, il est évident que " l'addition " est lourde. Fukushima a déjà expédié trois fois plus de débris dangereux que Tchernobyl, et cela continue, jour après jour. En quelles quantités ? Les chiffres sont incertains, mais très élevés. Les enfants de la région commencent à présenter des cancers, déjà. Dans cinq ans, ce sera bien entendu beaucoup plus lourd. La pollution, loin d'être stoppée, se sera étendue en quantité et en superficie. Rien ni personne ne peut la stopper désormais.
Naoto Matsumura |
Le Japon possède 54 réacteurs. Ils sont à l'arrêt, mais certains supplémentaires sont en construction, comme à Oma tout au nord de l'île principale de Honshü, à 25 kilomètres de la ville de Hakodate, principal port de l'île de Hokkaido. Pire, il est prévu de charger le réacteur.... au MOX ! Le maire de la ville de Hakodate, soutenu par ceux des cités environnantes, bataille pour faire interdire une pareille menace si près de sa ville de 300 000 habitants. Les profiteurs n'ont-ils toujours pas compris ?
Ce 11 mars 2014, pour le troisième anniversaire du début de la catastrophe, le dernier homme ayant refusé de quitter la zone dangereuse de Fukushima (il continue à y soigner les animaux qui restent dans le région) va être accueilli au Parlement de Strasbourg, afin de témoigner. Naoto Matsumura a bénéficié d'une solidarité internationale pour venir ainsi expliquer les dangers immenses du nucléaire. Souhaitons-lui d'être entendu ! Lui, sait qu'à moyen terme il est condamné. Mais à 54 ans il sait avoir l'essentiel de sa vie derrière lui. Au contraire, ce sont les plus jeunes, qui risquent de payer le prix fort les premiers.
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Précisions : sur la carte, la centrale est située sur les communes d'Okuma et Fubata. Naoto Matsumura est originaire de Tomioka, juste au sud de ces villages.
Explosion du réacteur N°3
Pour le nettoyage de ces saletés le Japon a trouvé la bonne solution : employer les SDF et toute sorte de précaires qui écument les rues. Payés 4€/heure, on prélève sur le montant journalier gagné le prix du repas fourni sur place et le reste est empoché par les yakuzas !...
RépondreSupprimerFarpaitement. Ni vu, ni connu, pas de statistiques. En revanche, pour la compétence des ouvriers, on repassera ! Or, le travail s'avère bien plus compliqué qu'à Tchernobyl, où un seul réacteur était affecté. Là, il y en a quatre à traiter, de façons différentes. C'est très complexe ! Et comme la firme a réagi avec retard, avec le souci de ne pas mettre trop d'argent, l'entreprise est vite devenue mission impossible.
SupprimerC’est le plus grand danger actuel de la planète. Aucune négociation n’est possible, aucun pouvoir ne peut freiner cette folies des hommes...!
RépondreSupprimerBien sûr Martine. Et pendant ce temps les hommes continuent à se quereller, à s'éventrer comme si cela avait encore de l'importance. Folie des hommes ! A ce point-là, c'est aussi de la stupidité crasse.
SupprimerJe ne suis pas le seul à écrire sur la question aujourd'hui.
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