mercredi 20 août 2014

Sans "riches" pas de salut ! (Le Grand Soir, Michel Taupin)

Vous connaissez Cuba ? S'il y a un pays que j'aimerais rencontrer, c'est bien celui-là. Malheureusement c'est loin, et mon espagnol tiendrait sur une rondelle de pain de mie.

Heureusement, grâce au Grand Soir nous en aurons une bonne idée en lisant cet article d'un de ses lecteurs, Michel Taupin. Et que tombe le Grand Méchant Vautour qui s'acharne sur la perle des Caraïbes, en vain.



Sans "riches" pas de salut !

Sans "riches" pas de salut ! Ou la cupidité comme moteur de l'économie. Dans l'Express Christine Kerdellant compare la France à Cuba !

L’Express avec Cuba, c’est comme le Klu Klux Klan avec les Noirs américains : une haine viscérale qui voue aux gémonies tout ceux et tout ce qui les dérangent, avec un mépris profond pour les êtres ou les politiques qui s’opposent à eux. Comme le Klu Klux Klan qui revendique la suprématie blanche, l’Express lui revendique la suprématie du capitaliste ultralibéral. Alors on se permet le pire ! Avec l’Express, c’est le lynchage médiatique systématique de Cuba !
En août, c’est la chroniqueuse Christine Kerdellant, journaliste, ancienne directrice du Figaro Magazine, qui s’y colle. Avec un texte intitulé "La France victime du syndrome de Cuba" on peut être sûr que son seul but est de flétrir à la fois la France et Cuba. L’idée de sa chronique est de taxer la France du même immobilisme dans lequel "l’île des Castro" (sic) s’est figée depuis 50 ans. Bref, comme Cuba, "la France est à l’arrêt", "la croissance est en berne", la France ne cesse de dévisser". Comme elle le dit elle-même, "le parallèle est osé". Mais il est bien plus qu’osé, il est imbécile, malhonnête, arrogant, mensonger, crapuleux et indécent.

Imbécile en effet, quand vous comparez Cuba, un pays pauvre des Caraïbes, à la France, pays riche d’Europe. La Banque Mondiale s’y refuse évidemment tant les ressources, les infrastructures et les disparités géographique, historique, culturelle, démographique et économique sont différentes et le pays étranglé par le blocus étatsunien.

Malhonnête, car vous cachez volontairement à vos lecteurs le blocus criminel que les EU infligent à Cuba depuis 53 ans et qui lui a été (et lui est encore) terriblement dommageable au plan de son développement économique puisque cette vengeance anachronique lui a déjà fait perdre 1100 milliards de dollars, sachant que le PIB annuel de Cuba sous blocus s’élève aujourd’hui à environ 80 milliards de dollars. A quoi il faut ajouter la part de budget importante que Cuba doit consacrer à sa défense pour se préserver des attentats et agressions multiples que le pays subit toujours de la part de l’Empire. N’en parler jamais est à la fois une faute journalistique inexcusable et une véritable escroquerie.

Arrogant, lorsque vous jetez sur Cuba ce regard méprisant et condescendant qu’ont les nantis, installés bien au chaud dans leur appartement cossu du 16ème et que vous jugez, péremptoire, que les cubains n’inventent plus parce qu’on "ne leur permet pas de devenir riches". Pour vous et votre dogme néolibéral, le moteur de l’activité économique ne saurait être autre chose que la cupidité ! Mais Madame Kerdellant, comment faire fortune sinon au détriment de la majorité, par le vol et l’exploitation d’autrui ? Citez moi une autre manière de s’enrichir qui ne fasse pas appel à ces deux là ?

Mensonger puisque vous affirmez que la croissance cubaine est au point mort. Or c’est tout le contraire, jugez plutôt : la croissance annuelle moyenne du PIB de Cuba a été entre 1971 à 2010 de 3,2% (malgré une chute vertigineuse entre 1988 (3,8%) et 1993 (-15%) due à l’écroulement des échanges commerciaux avec les Pays de l’Est). Elle est remontée dès 1994 pour atteindre 8% en 1996 et, jusqu’en 2012 (derniers chiffres enregistrés par la BM), en net redressement, elle a connu une moyenne de 4,8%. Or, si la croissance moyenne du PIB de la France entre 1961 et 2012 est la même que Cuba (3,2%), de 1996 à 2012, elle n’a été que de 1,57% avec une chute importante en 2008 et 2009... qui continue. Cela signifie que Cuba n’est pas, comme vous l’affirmez, immobile, mais au contraire de la France, un pays qui cherche en permanence à faire évoluer sa démarche révolutionnaire socialiste vers plus d’initiative, d’efficience, d’équité et de bien-être dans la mesure de ses moyens.

Crapuleux, quand vous moquez les transports, effectivement difficiles à Cuba, en ne donnant comme raison à ces difficultés que le fait suivant : "les malheureux cubains ne peuvent s’acheter de voitures individuelles bien trop chères" ! Or la politique éco-socialiste cubaine est tout le contraire de l’individualisme forcené et du consumérisme ravageur qui sont deux des raisons de l’appauvrissement intellectuel et de la dépendance d’un peuple. La priorité du gouvernement cubain est le développement des transports publics accessibles à tous et la préservation de l’environnement. Mais comme vous le savez, elle se heurte au blocus étatsunien et à l’extra-territorialité des lois américaines qui le régissent (crédits bancaires impossibles, paiements comptant obligatoires et prix très élevés), et les empêchent de développer les infrastructures lourdes et d’acheter des véhicules et les pièces de rechange nécessaires à leur entretien.

Et les vieilles voitures américaines qui roulent nombreuses à Cuba et qui font frémir votre petit cœur de VRP du capitalisme (elles font désormais partie du patrimoine culturel cubain), subissent le même sort puisque leurs propriétaires ne peuvent se procurer de pièces de rechange. L’entretien de ces monuments historiques est bien le seul domaine d’ailleurs où vous reconnaissez aux cubains de l’imagination et de l’inventivité ! Quant au prix des voitures importées, vous êtes aussi sérieuse qu’un clown dans un cirque : Cuba importe ses véhicules au prix fort (tarif moyen appliqué en local) et les taxes que Cuba prélève, servent à développer et moderniser les transports en commun. Il est évident que le revenu moyen des cubains ne peut leur permettre de se payer des voitures individuelles neuves. Et la frustration des cubains n’est pas tant comme vous l’affirmez, l’impossibilité de s’offrir une bagnole (même si cela flatte l’égo) mais dans le fait que Cuba est empêché par l’Empire de développer et moderniser son réseau de Transports Publics. Ce que vous n’arrivez pas à rentrer dans votre petite tête préformatée d’HEC, c’est que Cuba est socialiste et préfère le partage à l’égoïsme destructeur d’une consommation insatiable.

Indécent, quand vous affirmez que les forces vives d’un pays, ce sont "les riches" qui, seuls selon vous, inventent, innovent. Sans les riches dites-vous, point de salut. Par conséquent, les pauvres sont responsables de leur propre indigence puisqu’ils n’ont aucune imagination et n’osent prendre aucun risque. Puis, sentencieuse, vous assénez : "Un pays qui refuse la logique de l’économie de marché, est un pays mort-vivant". Une logique dévastatrice qui plonge une part toujours plus grande de la population française non seulement dans la pauvreté (9 millions) mais de plus en plus dans la misère (2,5 millions) avec parallèlement un nombre de super-riches qui s’accroît, affichant des fortunes indécentes. D’un côté donc une concentration accrue des richesses, de l’autre une explosion de la pauvreté ! Robespierre disait en son temps : "Le fléau des peuples ce sont les riches. L’intérêt du peuple est l’intérêt général, celui des riches est l’intérêt particulier". Rien n’a changé, seules les féodalités sont passées dans d’autres mains. Des féodalités qui nous enfoncent dans l’obscurantisme du Moyen-âge. C’est un dessein inhumain et mortifère.

A Cuba, depuis la Révolution, c’est une projet de société autrement plus vivant et humaniste qui est proposé. Une toute autre logique est en œuvre à Cuba, malgré ses faibles ressources et les obstacles mis sur sa route, c’est la logique du partage ! Après le triomphe de la Révolution, les riches capitalistes cubains n’ont jamais voulu partager avec le peuple. Il s’en suivit une série de nationalisations dont les profits ont été enfin redistribués au peuple lui-même. Le socialisme cubain était en marche soutenu par l’une des formes de démocratie les plus avancées, la démocratie participative. Et, comme vous le dites peu et mal, il a permis au pays d’éradiquer la misère et la discrimination raciale, d’éduquer, de soigner, de loger, de cultiver toute la population sans exception.

Cette logique que vous exécrez tant, a ouvert des droits nouveaux, inconnus jusqu’alors, comme l’égalité des droits hommes-femmes, l’interdiction du travail des enfants, la prise en charge des anciens, le respect de la diversité sexuelle et la défense de l’environnement pour n’en citer que quelques uns.

Cette logique que vous haïssez tant, a permis au peuple cubain de retrouver sa dignité, sa fierté et sa joie de vivre, et a fait de Cuba un pays phare détesté par les cupides mais aimé par tous les humanistes. Imaginez un petit instant, Mme la chroniqueuse, que Cuba ait disposé depuis 1960 de toute sa liberté, de sa souveraineté pleine et entière et de tous les moyens financiers dont les USA l’ont privé depuis 50 ans, imaginez alors ce qu’aurait pu être Cuba aujourd’hui !

C’est la peur de voir le modèle capitaliste KO qui fait que l’Empire refuse de voir cette expérience se développer sans entrave. Cuba résiste parce que son peuple sait depuis longtemps que le système que vous proposez est un leurre et que si le socialisme cubain est perfectible, le peuple dans son immense majorité lui est acquis et ne voudra jamais revenir aux temps d’avant la Révolution. Alors vous enragez.

Vous auriez dit : "Seuls souffrent de l’horreur du monde ceux qui en ont vu la beauté." Je partage cet aphorisme en le précisant : "Voyez la beauté de Cuba et vous souffrirez sans doute plus encore des horreurs de votre monde".

Michel TAUPIN
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5 commentaires:

  1. Loué sois-tu -
    Je ne connais pas , hélas , Cuba ,mais je zyeute de ces côtés des amériques latines -
    Pays qui ont leurs défauts aussi mais surtout 1000000000 qualités et un coeur gros comme l ' univers -
    Pas seulement a politique mais aussi la culture -
    Vas zouir du côté de Compaye Segundo " , " Elliades Ochoa " , etc ....
    votre ami , c ' est le Brésil , mais c ' est à peu près pareil ...
    ( une amitié indestructible )
    Bonne vie à toi , à toutes et tous ,

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  2. J'adore vos lectures rigolotes ! Elles me font toujours un bien fou au moral…

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  3. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  4. La photo de bagnole en en-tête me fait me souvenir de « MAMMA », anecdote authentique car racontée par Hans, chanteur de rue qui devint un cher ami (je l'ai connu car il chanta sous ma fenêtre !). Hans est né en 45 sous les bombes à Hambourg, qui ont tué ses parents. Élevé à la dure, il fugue à 16 ans, arrive (en trichant sur son âge) à se faire embarquer moussaillon sur un cargo à destination de New-York, « le rêve ». Il déserte son poste à peine débarqué, « pour faire fortune »... En fait, il neige, c'est Christmass et, faute de job, le voilà auprès d'un brasero avec des poivrots et des fugueurs. Mamma le recueille en son taudis bondé de Harlem. Il y reste des mois avant de se faire dénicher par les flics. Case prison et retour. VINGT ans plus tard, Hans a fait fortune en RFA. Mais il « décroche », dégoûté. Revient en pacha à New-York, retrouve Mamma (via un détective) et c'est la Fête !!!... En douce, il achète une BUICK neuve qu'il fait livrer à Mamma lorsqu'il est dans l'avion de son retour. Puis s'achète un vieux camion qu'il bricole en logement, une orgue de barbarie d'occaz et hop : chanteur de rues, une quinzaine d'années (avant que nous fassions connaissance). Répertoire ?: Blues, Lili Marlène, Trenet, Prévert, Ferré...
    C'est chez moi, qui lui sert de boîte aux lettres, qu'arrive LA nouvelle... : Hans a demandé à un ami de passage à NY d'aller visiter Mamma. Il lui envoie de là des photos stupéfiantes : La Buick est là où elle a été livrée, depuis 15 ans. Moteur,etc. ont été vendu, les banquettes font salon... Et sur une photo, Mamma trône sur le capot, hilare... Elle a griffonné un mot au verso du genre : « Ta buick fait ma GLOIRE »...

    Inutile d'ajouter que Hans et moi aimons CUBA LIBRE, le vrai. Et conchions sur l'Express etc.
    Par contre, j'ajoute que je n'ai plus de nouvelles de lui, hélas, depuis des années. Il a subi une série de coups durs. Sa compagne la quitté avec la caisse. Puis il s'est fait volé son chien et son orgue de barbarie. Mon « Pierrot de la Lune » (selon son maquillage) était dépressif et pire, la dernière fois que je l'ai vu. Mais je lui ai connu son jour de GLOIRE, avec cette photo dédicacée ...

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  5. J'ai été surpris de voir un presque doublon de mon commentaire ci-dessus. En fait, à tort, j'ai cru avoir fait une erreur de manip et me persuadais avoir perdu mon premier texte. Je l'ai donc ré-écris de mémoire... et je viens donc de supprimer le premier !!

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