(retrouver ce billet sur Ruminances, avec les commentaires)
L'Ingénieur & Le Génie
Armé
de sa savante culture mathématique, Monsieur l'Ingénieur (la spécialité
se féminise enfin!) a du prestige et/ou est craint. Il est en général
un personnage fort respecté dans tous les milieux où il exerce,
industriels ou agricoles, aussi bien auprès des humbles exécutants que
de leurs dirigeants. Encore que ces derniers aient les moyens financiers
d'attirer leurs bonnes grâces, voire de leur céder du
pouvoir...corrompu et corrupteur : parmi les rares exceptions à cette
règle, citons le très courageux René Dumont
qui s'est lancé, ingénieur agronome au départ, dans la bataille
politique d'orienter en France le mouvement écologiste naissant sur sa
seule base valable, l'alter-mondialisme et la justice sociale. Un
pionnier d'avant-garde, dont se réclame encore de rares courageux Verts
d'aujourd'hui comme Alain Lipietz (lui-même ingénieur formé à Polytechnique)...
Je
connais aussi une autre expérience, mais bien ratée, tant pis pour lui
et nous... Nous ? Nous sommes 3 nazairiens qui relayons l'appel de
Daniel Mermet à créer ici un repère (repaire?) de « Là Bas Si J'y Suis » et on s'y risque (un peu légèrement avec « on verra bien »)...
Et on a vu cela : dès le début de la 1° réunion (d'une quinzaine de
personnes presque toutes inconnues) ça tourne mal, à cause de « Monsieur l'Ingénieur des Chantiers Navals de l'Atlantique » - respect !
Ce citoyen est venu, avec copies qu'il distribue, son « plan génial » (A/B/C/D... subdivisés en 1/ 2/3/4...) et se lance à nous le présenter. Nous l'interrompons assez vite en rappelant que l'on fait d'abord un tour de table pour commencer de nous connaître, etc. Mais il expose qu'il est, lui, « ingénieur » et « donc » qu'il sait comment faire la révolution ! On rigole, il est un peu vexé... Lui succède une pauvre femme qui quémande auprès de nous de l'aider tant elle est dans une noire misère : un tout autre aspect de la réunion, également imprévu ! De plus en plus, « l'ingénieur génial » reviendra interrompre nos interventions diverses avec des assertions du genre : « voilà pourquoi j'ai un plan génial pour la révolution ! »... Bref, dès la 3° réunion, cela tourne au fiasco !
Ce citoyen est venu, avec copies qu'il distribue, son « plan génial » (A/B/C/D... subdivisés en 1/ 2/3/4...) et se lance à nous le présenter. Nous l'interrompons assez vite en rappelant que l'on fait d'abord un tour de table pour commencer de nous connaître, etc. Mais il expose qu'il est, lui, « ingénieur » et « donc » qu'il sait comment faire la révolution ! On rigole, il est un peu vexé... Lui succède une pauvre femme qui quémande auprès de nous de l'aider tant elle est dans une noire misère : un tout autre aspect de la réunion, également imprévu ! De plus en plus, « l'ingénieur génial » reviendra interrompre nos interventions diverses avec des assertions du genre : « voilà pourquoi j'ai un plan génial pour la révolution ! »... Bref, dès la 3° réunion, cela tourne au fiasco !
Bien
plus ancienne et grave est cette expérience : je suis enfin embauché à
mon 1° boulot important (à mes 25 ans fin 1963) dans le métier
passionnant de cartographe. Faussement présentée comme venant de
l'Institut Géographique National, cette société a en fait débauché de
l'IGN, vieux cartographes et surtout jeunes ingénieurs géologues (formés
à l’École des Mines...) qui en sont les chefs. Et il s'agit d'une
filiale de l'industrie pétrolière (plus tard Elf puis Total) qui
cartographie les sols d'anciennes colonies françaises d'Afrique (sans
l'Algérie qui vient de conquérir son indépendance). Non seulement pour
un éventuel pétrole, mais pour d'autres commandes, telle celle du Roi du
Maroc qui a besoin de « cartes du cadastre » pour prélever ses impôts...
C'est là l'une des occasions d'un conflit interne. Nous, « photo-interprétateurs »
devons sur vision en relief de photos aériennes pouvoir délimiter - à
Paris ! - les parcelles agricoles du Mohammed et du Ahmed local ! On
nous assure qu'il y a des vérificateurs sur place : ils sont 2 pour
l'immense Maroc !! - A l'époque, nous sommes de nombreux jeunes
cartographes à peine sortis de la Guerre d'Algérie, à la fois très
heureux de tourner le dos à ce vécu à contrecœur, et conscients de la
férocité du système colonial. En face, nos ingénieurs-chefs (parfois de
nos âges) sont durs. Nous voulons aller nous-mêmes sur place, entre
autres revendications. C'est la grève... Et cela se terminera mal pour
nous tous : licenciement total, la boîte ferme... et les géologues en
feront une autre !... C'est nous les chefs, ingénieurs-capitalistes, non
mais !
Troisième anecdote plus souriante et bien plus ancienne. Ma jeune sœur adolescente est «fiancée» au fils de « Monsieur l'Ingénieur en Chef du canal de Suez », vers 1956, peu avant la nationalisation de Suez par Nasser. Dépité, mon copain d'école Claude François en fera la chanson « pauvre petite fille riche » ! Mieux encore, il vantera son père « ingénieur » dans divers magasines alors qu'il n'était que – et c'est honorable ! – contre-maître dans un atelier du canal...
Bref il peut y avoir du génie dans l'ingénieur mais aussi de l'ingénu ou du salaud : comme partout !
Vous êtes ingrats, z'auriez pu étudier son plan révolutionnaire !
RépondreSupprimerRassures-toi, "des pas perdus", son plan génial était résumé sur papier et certains d'entre nous l'ont donc étudié à loisir ! Moi, il m'en reste un vague souvenir d'un truc de montage de mécano, logique, faisant que le peuple déléguait son pouvoir souverain aux plus compétents - les ingénieurs - au lieu des démagogues députés habituels : quel progrès !! On en voit l'application avec les "technocrates" qui nous gouvernent à Bruxelles, prennent le pouvoir à Athènes ou Rome... Tu parles d'une révolution !
RépondreSupprimerEn plus, ce truc n'avait RIEN à voir avec l'esprit, la fraîcheur, des émissions de Daniel Mermet (tiens, aujourd'hui, il continue sur "les ouvriers en France" : à ne pas louper!)